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Changement de prénom : une simplification de la procédure ?

Jusqu’alors, changer de prénom nécessitait une action devant le Juge aux Affaires Familiales : il fallait expliquer les raisons de ce changement et en quoi elles constituaient un motif légitime.

Depuis la loi du 18 novembre 2016 relative à la modernisation de la justice du XXIème siècle  (n°2016-1547), la saisine du Juge n’est plus obligatoire. La procédure s’en trouve-t-elle pour autant simplifiée ?

  • la Loi ancienne

Jusqu’au 19 novembre 2016, toute demande de changement de prénom était soumise à la loi ancienne.

Ainsi, il convenait de saisir le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal du lieu de domicile ou du lieu de naissance du requérant et de détailler les raisons qui constituaient l’intérêt légitime justifiant cette demande.

Cette procédure, outre qu’elle était onéreuse pour le justiciable puisqu’elle imposait l’assistance d’un avocat, avait pour inconvénient d’alourdir la charge de travail des Tribunaux.

Or, pour bon nombre de dossiers, la question de l’intérêt légitime ne posait pas de difficulté : par exemple, il était établi que depuis vingt ans, telle personne utilisait tel prénom , ou bien une simple inversion de l’ordre des prénoms était demandée.

Mobiliser un Juge et un Greffier pour acter ce changement semblait excessif et, en outre, était difficilement compréhensible pour le justiciable.

Le demandeur avait en effet l’impression d’être « traduit en justice », de devoir se justifier en présentant de nombreux documents et attestations, pour ce qu’il considérait comme une simple formalité administrative.

Afin de désengorger les Tribunaux, le législateur a décidé de transférer certains contentieux hors des Tribunaux.

Il en est ainsi du divorce par consentement mutuel (devenu désormais l’apanage des Notaires), mais aussi du changement de prénom.

  • La Réforme

Ainsi, à compter du 19 novembre 2016, la demande de changement de prénom doit être portée devant l’officier d’état civil de la mairie du lieu de résidence du requérant ou de son lieu de naissance.

Il doit, tout comme sous l’empire de la loi ancienne, justifier d’un intérêt légitime à solliciter ce changement de prénom.

Si l’officier d’état civil accepte cette demande, la décision de changement de prénom sera directement inscrite sur le registre de l’état civil.

En revanche, si l’officier d’état civil considère que la demande ne revêt pas d’intérêt légitime, il devra saisir sans délai le Procureur de la République.

La loi nouvelle précise ce que pourrait être un défaut d’intérêt légitime :

  • une demande de changement de prénom contraire à l’intérêt de l’enfant,
  • ou contraire aux droits des tiers à voir protéger leur nom de famille.

Il ne s’agit évidemment pas de cas limitatifs, l’officier d’état civil disposant de toute latitude

pour apprécier le caractère légitime ou pas du changement de prénom.

Nous ne pouvons que supposer que l’officier d’état civil se basera sur la jurisprudence en vigueur dans ce domaine, et considérera qu’un intérêt légitime est constitué :

  • lorsque le prénom est ridicule ou lorsque l’association du prénom et du nom est ridicule,
  • lorsqu’un autre prénom est utilisé dans la vie courante,
  • en cas de transsexualisme,
  • lorsque le prénom a une consonance étrangère,
  • pour motif religieux (lorsque le prénom fait obstacle à la pratique d’un culte).

Nous pouvons aussi supposer que les demandes pour convenance personnelle ou motif fantaisiste seront toujours refusées.

Si le Procureur de la République, saisi par l’officier d’état civil, s’oppose à ce changement de prénom, le demandeur pourra alors saisir le Juge aux Affaires Familiales.

Il apparait donc que le Juge aux Affaires Familiales reste compétent en la matière, et que l’officier d’état civil n’est qu’un filtre permettant aux demandes manifestement fondées et sur lesquelles aucune discussion ne porte, d’aboutir directement, sans encombrer les juridictions inutilement.

Il est ainsi aisé de deviner que :

  • si la procédure est simplifiée pour Louise, Marie XX qui veut supprimer Louise de son état civil car elle utilise uniquement le prénom Marie depuis 30 ans, dans le cadre personnel et professionnel,
  • il en sera autrement pour le petit Camille dont les parents voudront finalement lui donner un prénom non mixte car toute la cour de récréation de l’école maternelle se moque de son prénom de fille.

En effet, dans l’hypothèse d’un refus de changement de prénom par l’officier d’état civil, le demandeur devra tout d’abord attendre que le Procureur de la République prenne position, puis, il lui faudra saisir le Juge aux Affaires Familiales.

Ainsi, pour les dossiers pour lesquels l’intérêt légitime n’est pas flagrant et nécessite une discussion, le délai sera très probablement trois fois plus longs (puisqu’il nécessite trois interlocuteurs au lieu d’un) que le délai actuel.

Cette simplification annoncée apparaît en réalité partielle…

Publié le 25 novembre 2016

http://www.village-justice.com/articles/Changement-prenom-une-simplification-procedure,23601.html