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La réforme pénale du 15 août 2014


Le 1er octobre dernier, la loi relative à l’individualisation des peines, dite « réforme pénale » ou encore «réforme Taubira » est entrée en vigueur. Elle avait été adoptée définitivement par le Parlement les 16 et 17 juillet 2014 et validée par le Conseil Constitutionnel le 7 août 2014 .

Annoncée lors de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive des 10 et 11 janvier 2013, ce projet de loi relatif à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales a fait l’objet de polémiques au sein de l’opposition mais aussi au sein de la majorité présidentielle.

L’objet de cette réforme dite « Taubira » est la limitation du recours à l’incarcération comme peine au profit de mesures alternatives afin de favoriser la réinsertion sociale.

Quels sont les changements apportés par la nouvelle réforme pénale de Madame la Garde des Sceaux ?

            • Une définition de la fonction et des finalités de la peine inscrite dans la loi

La nouvelle réforme pénale définit les buts de la peine dans un article 130-1 du code pénal : « Afin d’assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l’équilibre social, dans le respect des intérêts de la victime la peine a pour fonction : 1° De sanctionner l’auteur de l’infraction ; 2° De favoriser son amendement ou sa réinsertion ».

Une définition claire de la fonction et des finalités de la peine est donc désormais inscrite dans le code pénal.

            • La création de la contrainte pénale

La probation comme alternative à l’emprisonnement est déjà utilisée en Suisse, à Monaco, en République Tchèque, en Roumanie mais également en Croatie et en Moldavie.

C’est la mesure phare de cette réforme. La contrainte pénale est une nouvelle peine prévue par l’article 131-4-1 du code pénal, permettant d’éviter l’incarcération des auteurs de délits dont la peine encourue est inférieure ou égale à 5 ans d’emprisonnement. Elle s’étendra à tous les délits à partir du 1er janvier 2017.

Le condamné bénéficiant de cette contrainte pénale devra se soumettre à des obligations et des interdictions qui lui seront imposées dans le cadre de sa peine. Par exemple, il pourra devoir se soumettre à des obligations de soins médicaux pour des addictions, suivre des formations professionnelles obligatoires, se voir interdire de fréquenter ou d’entrer en contact avec certaines personnes, ou encore indemniser la victime.

Ces obligations et interdictions seront assorties de mesures de contrôle et d’assistance ayant pour but de prévenir la récidive en favorisant la réinsertion au sein de la société. En outre, la peine peut  durer de six mois à cinq ans.

Cette contrainte pénale apparaît comme un moyen supplémentaire mis à la disposition des magistrats dans leur arsenal répressif. Ils auront ainsi le choix entre prononcer une peine privative de liberté ou prononcer une peine probatoire.

Plusieurs mesures probatoires sont ainsi à la disposition des magistrats :

L’exemple du sursis avec mise à l’épreuve comme mesure probatoire

Le sursis est une alternative à l’emprisonnement puisque la peine prononcée ne sera effectuée que si le condamné manque à ses obligations durant le délai d’épreuve.

Le but est ainsi de dissuader le condamné à récidiver afin qu’il n’aille pas en prison.

L’exemple des amendes comme mesure probatoire

Plutôt que d’effectuer une peine de prison, le condamné va se voir imposer le paiement d’une sanction monétaire qu’il devra verser à l’Etat.

L’exemple des compensations comme mesure probatoire

Le principe de la compensation est la réparation directe du préjudice de la victime par l’auteur de l’infraction. Ce dernier devra directement verser une somme d’argent à la victime.

L’exemple du placement sous surveillance électronique comme mesure probatoire

Le principe est de permettre la surveillance d’une personne condamnée en lui imposant le port d’un bracelet électronique doté d’un système de géolocalisation.

L’administration pénitentiaire en charge de ce dispositif a ainsi la possibilité de suivre le condamné dans ses déplacements afin de vérifier le respect des obligations et des interdictions fixées par les autorités judiciaires au condamné.

– L’exemple des travaux d’intérêt général comme mesure probatoire

La peine de travaux d’intérêt général consiste, pour le condamné, à effectuer dans un temps déterminé, un travail non rémunéré au profit d’une collectivité publique ou d’une association.

      • La suppression des peines planchers

Mises en place par la loi du 10 août 2007 relative à la lutte contre la récidive, les peines planchers sont des peines incompressibles imposées par la loi : dès lors que la culpabilité du prévenu ou de l’accusé est reconnue, le juge doit, dans certaines conditions, prononcer une peine dont le quantum ne peut être inférieur à un seuil minimal, sans prendre en considération la gravité de l’infraction ou le profil de l’auteur.

La loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales a supprimé ces peines planchers. Le juge retrouve donc toute latitude dans la fixation du quantum de la peine.

      • L’aménagement des sorties de prison

La réforme prévoit également la possibilité pour le Juge de l’application des peines de prononcer des aménagements de peines pour les condamnés à cinq ans d’emprisonnement au maximum et ayant déjà effectué les deux tiers de la peine. Par exemple : une libération conditionnelle, une surveillance électronique, un régime de semi-liberté ou encore un placement extérieur.

Cette mesure a pour but d’éviter les sorties de prison dites « sèches », jugées trop brutales et non propices à la réinsertion sociale.

      • La césure dans le procès pénal

Afin de mieux adapter la peine en fonction de la personnalité du prévenu, de son comportement avec la victime et de la gravité de l’infraction, une pause de maximum quatre mois pourra être prise durant le procès avant le prononcé de la peine.

Cela signifie que, lors de l’audience, le Tribunal se prononcera sur la culpabilité du prévenu et reportera la prononcer de la peine à une audience ultérieure, dans un délai maximum de quatre mois.

Bien qu’elle soit inédite en France, cette mesure est courante à l’étranger, notamment dans les pays anglo-saxons.

      • L’entrée de la « justice restaurative »

Ce système est un autre apport des pays anglo-saxons. Il permet, sur la base du volontariat, aux victimes et auteurs d’infractions de se rencontrer afin que la victime obtienne réparation et que l’auteur prenne conscience du préjudice causé.

De nouvelles dispositions sont aussi mises en place pour améliorer l’information, l’accueil et l’indemnisation des victimes.

      • La révocation automatique du sursis simple supprimée

Le sursis simple est une dispense qui permet à la personne condamnée de ne pas exécuter tout ou partie de la peine prononcée.

Avant la loi du 15 août 2014, sa révocation se faisait de façon automatique dès la commission d’une nouvelle infraction délictuelle ou criminelle dans les cinq ans après son prononcé.

Désormais, la décision de révocation devra être expressément prononcée par la juridiction saisie de la nouvelle infraction.

Publié le 8 octobre 2014

http://www.village-justice.com/articles/reforme-penale-Par-Juliette-Daude,17944.html