Changer de prénom : une procédure loin d’être gagnée !
Aux États-Unis, le changement de prénom se déroule, le plus souvent, devant un guichet, sur la base d’un formulaire.
Ainsi, aux Etats-Unis ou même en Grande Bretagne, le prénom n’est pas une affaire d’État, mais une affaire personnelle.
Même si la personne souhaitant changer de prénom doit
indiquer les raisons de sa demande, le simple conseil d’un astrologue paraît
suffisant !!
En France, changer de prénom exige de se faire assister par un avocat, de
constituer un dossier circonstancié, et de se présenter à une audience devant
un Juge.
En effet, il est important de comprendre que le prénom doit permettre à celui
qui le porte de trouver sa place dans le cercle familial et plus largement dans
la société.
Il s’agit donc de faire un choix réfléchi de la part des parents mais également de la personne qui choisirait de changer son prénom.
Par la suite, il n’est pas si aisé d’en changer, et même si la procédure judiciaire est entièrement respectée, il n’est pas systématique d’obtenir le changement de prénom souhaité.
Le prénom et le changement de prénom en France : S’il est aujourd’hui plus facile de choisir pour ses enfants des prénoms originaux, nombreux sont ceux qui se retrouvent par la suite souffrir de ce choix.
Le principe de la liberté des parents pour le choix du
prénom de leur enfant est posé par l’article 57 du Code civil : « Les prénoms de l’enfant sont choisis par ses père et mère. […]
L’officier de l’état civil porte immédiatement sur l’acte de naissance les
prénoms choisis. »
L’officier de l’état civil ne dispose donc plus d’un pouvoir de censure
immédiat, contrairement à une ancienne législation.
Cependant, l’officier de l’état civil peut aviser sans délai le Procureur de la République si le prénom semble contraire à l’intérêt de l’enfant.
Le changement de prénom quant à lui est prévu, d’une part, par l’article 60 du Code civil qui dispose que « Toute personne qui justifie d’un intérêt légitime peut demander à changer de prénom. La demande est portée devant le juge aux affaires familiales à la requête de l’intéressé ou, s’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur en tutelle, à la requête de son représentant légal. L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut pareillement être décidée ».
D’autre part, il est également prévu par la loi n° 72-964 du 25 octobre 1972 relative à la francisation des noms et prénoms des personnes qui acquièrent, recouvrent ou se font reconnaître la nationalité française.
Il existe dès lors deux hypothèses dans lesquelles un changement de prénom peut être demandé : lorsque la demande présente un intérêt légitime ou dans le cadre d’une francisation de son prénom suite à une naturalisation.
- L’intérêt légitime : Si l’intérêt légitime peut s’apparenter à un intérêt important et sérieux, sa définition pose toutefois des difficultés puisqu’elle nécessite un jugement moral. Il est à noter que les Juges ne considèrent pas comme présentant un intérêt légitime les demandes fondées sur une convenance personnelle ou sur un motif fantaisiste. Enfin, depuis la loi du 17 mai 2011 n°2011-525 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, la demande d’inversion de l’ordre des prénoms figurant sur l’acte de naissance est possible.
- Francisation du prénom : Par ailleurs, il est également possible de changer de prénom et de le franciser en acquérant la nationalité française. Cependant il est à noter que parfois, dans la pratique, la francisation est difficile à mettre en œuvre. Le nouveau prénom n’est pas utilisé car il apparaît trop étranger à soi-même.
Exemples de cas de refus de changement de prénom :
- sur le motif religieux : les juges ont estimé que le fait de porter un prénom français n’interdisait pas de pratiquer la religion hébraïque ni de revenir à ses racines et qu’ainsi la demande de changement de prénom était privée d’intérêt légitime [1].
- sur le motif de convenance : le désir du demandeur de substituer à ses prénoms des diminutifs, déjà utilisés habituellement dans la vie courante, ne constitue pas un intérêt légitime justifiant la demande de changement de prénom [2].
- sur la reprise du prénom d’origine : une personne ayant été naturalisée française et autorisée à porter le prénom de Louise ne justifie pas d’un intérêt légitime à demander le changement de prénom pour son prénom d’origine, celle-ci ayant expressément accepté la francisation de son prénom. Le certificat médical produit par la personne pour justifier des conséquences psychologiques du changement de prénom, ne démontrait pas que l’usage de son prénom français l’ait coupé de sa famille. Les motifs religieux invoqués étaient en outre inopérants et très généraux [3].
De la même manière et à titre d’exemple, des parents appelant leur fils Camille et souhaitant revenir sur leur décision six mois après la naissance de l’enfant, réalisant à l’usage que ce prénom correspondait plus au sexe féminin qu’au masculin, ne sauraient être fondés par un quelconque intérêt légitime.
Ainsi, si le prénom d’une personne est à choisir de manière
réfléchie, il faut savoir encore quels motifs sérieux il est possible
d’invoquer lorsque l’on souhaite changer son prénom.
Comme l’a décrit Iegor Gran dans son ouvrage « La revanche de
Kevin », aujourd’hui, ce n’est pas la personne qui façonne son prénom mais
son prénom qui façonne la personne.
Les conseils d’un avocat au sujet de la procédure de changement de prénom et des motifs à invoquer en ce sens pourraient s’avérer nécessaires.
Publié le 20 avril 2015
Lien: http://www.village-justice.com/articles/changer-prenom-une-procedure-loin,19478.html