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Focus sur la loi en matière de terrorisme (23 janvier 2015)

Les attentats des 7, 8 et 9 janvier 2015 ont remis sur le devant de la scène les dispositions légales en vigueur en matière de terrorisme.

Triste hasard du calendrier, il se trouve que le Ministre de l’Intérieur avait justement fait voter une loi visant à renfoncer la lutte contre le terrorisme et à prendre en compte les évolutions récentes des actes de terrorisme, promulguée le 13 novembre 2014.  

Il convient donc de voir ce que cette loi apporte aux dispositions actuelles et quelles sont, de façon générale, d’une part la définition légale des actes terroristes, ainsi que les moyens d’enquête.

Présentée en Conseil des ministres le 9 juillet 2014 par Monsieur Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur, la loi visant à renforcer la lutte contre le terrorisme et à prendre en compte les évolutions récentes des actes de terrorisme a été promulguée le 13 novembre 2014.

Un premier décret d’application de la loi du 13 novembre a été publié le 14 janvier 2015, suite aux récents événements des 7 et 9 janvier 2015.

Il concerne la disposition qui met en place une interdiction administrative de sortie du territoire pour éviter que certains ressortissants ne se radicalisent à l’étranger et risquent de présenter une menace à leur retour en France.

C’est le Ministre de l’Intérieur qui pourra décider de cette interdiction de six mois maximum et renouvelable « aussi longtemps que les conditions seront réunies ».

En outre, le passeport et la carte nationale d’identité de la personne concernée pourront être invalidés dès le prononcé de l’interdiction de sortie du territoire.

Les autres décrets devraient être publiés dans les prochaines semaines, notamment ceux qui permettront le blocage administratif et le déréférencement des sites internet djihadistes.

Si la loi du 13 novembre 2014 semble apporter de réelles nouveautés et modifications en matière de lutte contre le terrorisme au niveau législatif administratif et technique, il convient de rappeler les dispositions pénales et de procédure pénale déjà existantes.

– La définition des actes terroristes (dispositions pénales relatives au terrorisme) :

Selon l’article 421-1 du code pénal, il y a acte de terrorisme dès lors qu’un crime ou un délit incriminé par le code pénal existe et que ces crimes ou délits aient un rapport avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur.

Ces actes de terrorisme sont énumérés de manière limitative et punis de peines aggravées (articles 421-3 et suivants du code pénal).

Le troisième article de la loi du 13 novembre 2014 complète la liste des actes terroristes en y ajoutant, à titre d’exemple, la diffusion de procédés permettant la fabrication d’engins de destruction.

En outre, d’autres infractions terroristes par nature comme l’association de malfaiteurs délictuelle et criminelle en relation avec une entreprise terroriste (articles 421-2-1, 421-5 et 421-6 du code pénal) sont également incriminées.

La loi du 13 novembre 2014 élargit à l’ « entreprise terroriste individuelle » les dispositions du code pénal relatives au délit d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste pour prendre en compte la possibilité pour une personne seule de préparer un acte terroriste.

Il est à souligner que c’est l’infraction d’association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme (article 421-2-1 du code pénal) qui est le plus souvent retenue par la jurisprudence pour poursuivre les membres des réseaux terroristes interpellés alors qu’ils n’ont pas encore commis l’infraction en question.

A noter que les actes préparatoires aux actes de terrorisme sont punis d’une peine de 10 ans d’emprisonnement et 225.000 euros d’amende (cela implique donc que l’entreprise terroriste n’ait pas aboutie, seule la préparation est punie).

La peine est de 20 ans et 350.000 euros d’amende lorsque le groupement formé avait pour objet la préparation d’actes de terrorisme mettant en danger l’intégrité physique de personnes (articles 421-5 et 421-6 du code pénal).

Par ailleurs, un des chapitres de la loi du 13 novembre 2014 renforce la répression de l’apologie du terrorisme et de la provocation à des actes de terrorisme.

En effet alors que ces incriminations étaient prévues par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, elles seront désormais inclues dans le code pénal et assimilés à des délits terroristes pour étendre les moyens d’enquête.

Elles ne seront donc plus soumises aux règles de procédures de droit commun mais bien aux dispositions de procédure pénale.

–  Les moyens d’enquête face au terrorisme (dispositions de procédure pénale relatives au terrorisme)

Un régime de garde à vue spécifique (article 706-88 à 706-88-2 du Code de Procédure Pénale)

Il est à souligner que les règles applicables au placement en garde à vue et aux droits de la personne mise en garde en vue en matière de terrorisme sont celle applicables à toutes les infractions (droit de prévenir un proche, droit à un médecin, droit au silence, et le droit d’être assisté immédiatement par un avocat, sauf raisons impérieuses).

Cependant la garde à vue en matière de terrorisme est spécifique car:

– l’accès à l’avocat peut être reporté pour 72 heures au maximum, pour raisons tenant aux circonstances particulières de l’enquête, c’est à dire soit pour recueillir ou la conserver des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes ;

la durée de garde à vue peut être prolongée par un magistrat jusqu’à 96 heures. Exceptionnellement, elle peut aller jusqu’à 144 heures s’il existe un risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger ou si les nécessités de la coopération internationale le requièrent impérativement.

Des techniques spéciales d’enquêtes

En matière de terrorisme, des opérations d’infiltration peuvent être autorisées par le procureur de la République ou le juge d’instruction (articles 706-81 à 706-87 du Code de Procédure Pénale).

Des saisies et perquisitions en dehors des heures légales peuvent également être effectuées (articles 706-89 à 706-94 du Code de Procédure Pénale).

En outre, des écoutes téléphoniques pour une durée d’un mois renouvelable une fois, après autorisation du juge des libertés et de la détention et à la requête du procureur de la République (article 706-95 du Code de Procédure Pénale) sont possibles.

Publié le 23 janvier 2015

http://www.village-justice.com/articles/focus-sur-les-dispositions-lEgales,18758.html