Le droit pénal de la famille
Parce que c’est au cœur du huis clos familial que se manifestent généralement les comportements violents et parce que les décisions du Juge aux Affaires Familiales ne sont pas toujours respectées, le droit pénal a dû intervenir dans le droit de la famille.
Des rapports conflictuels peuvent en effet, entraîner des situations difficiles, voire insupportables, auxquelles le législateur s’est intéressé.
Ces différends peuvent engendrer des atteintes à l’intégrité des membres de la famille ainsi que des atteintes aux prérogatives de ses membres.
– Des atteintes à l’intégrité des membres de la famille
Qu’elles causent des souffrances physiques ou psychiques, les atteintes à l’intégrité des membres de la famille sont réprimées sévèrement par la loi française puisqu’elles sont considérées comme une circonstance aggravante de l’infraction.
• Violences physiques et psychologiques
1) Les menaces
Les menaces sont constitutives d’un délit lorsqu’elles consistent à faire connaître à quelqu’un son intention de porter atteinte à sa personne ou à ses biens, que ce soit verbalement, par écrit, par image ou tout autre moyen.
Si les menaces sont réprimées par l’article 222-17 du Code pénal, l’article 222-18-3 du Code pénal prévoit, lui, une peine plus lourde « Lorsqu’elles sont commises par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ».
2) Les violences volontaires
Les violences conjugales touchent tous les milieux sociaux, sans distinction.
Ces violences peuvent entraîner des drames : c’est une femme tous les deux jours et demi qui meurt sous les coups de son conjoint (étude du Ministère de l’Intérieur publiée le 8 juin 2013).
Les hommes sont également victimes des coups de leur compagne, dans une proportion moindre.
Les violences volontaires commises par « le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité » sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende lorsqu’elles n’ont pas entraîné d’interruption temporaire de travail supérieure à huit jours (article 222-13 6°du Code pénal).
Lorsque ces violences ont entraîné plus de huit jours d’interruption temporaire de travail, la peine encourue est portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000€ d’amende (article 222-12 4° ter du Code pénal).
Mais parce que la violence infligée peut être aussi psychologique, la loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, a inséré un nouvel article dans le Code pénal en créant l’infraction de harcèlement moral conjugal.
Ainsi, l’article 222-33-2-1 du Code pénal dispose que « Le fait de harceler son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours. »
La loi pénale est venue étendre l’arsenal judiciaire à toutes les victimes de violences conjugales sans différence de traitement entre les personnes mariées, pacsées ou concubines.
De plus, il est précisé au sein du second alinéa que le texte est applicable également aux ex conjoints, partenaires ou concubins.
Les violences ne se limitant pas toujours à la personne du conjoint mais s’exerçant parfois aussi sur les enfants, l’article 222-13 du Code pénal prévoit dans son dernier alinéa, une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000€ d’amende lorsque les violences ont été commises sur un mineur de moins de quinze ans par un ascendant ou par toute personne ayant autorité (comme le beau-parent par exemple).
Fort d’un tel constat, l’organisation d’un régime permettant l’éviction du domicile du conjoint violent est apparue comme une nécessité criante.
Ainsi, sur le plan civil, la loi du 9 juillet 2010 a créé l’ordonnance de protection (voir article intitulé « L’ordonnance de protection : un moyen efficace pour protéger la victime de violences conjugales »).
Sur le plan pénal, des mesures pourront également être prises dans le cadre d’une condamnation pénale afin d’éloigner le conjoint violent de sa victime (interdiction de rentrer en contact avec sa victime, interdiction de se rendre aux alentours du domicile de la victime etc.).
• Le viol
Le viol est définit par la loi comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise » (article 222-23 du Code pénal).
La loi n°2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs a inséré un alinéa à l’article 222-24 du Code pénal.
Le viol « commis par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité » est désormais punissable de vingt ans de réclusion criminelle.
Le viol entre conjoints est donc un crime qui a d’abord été reconnu par la jurisprudence avant de l’être par le législateur.
C’est en effet un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 5 septembre 1990 (pourvoi n°90-83.786) qui a reconnu le viol entre époux pour la première fois en balayant la présomption de consentement à l’acte sexuel lié au « devoir conjugal ».
Puis, le 22 novembre 1995, la Cour Européenne des Droits de l’Homme, dans son arrêt C.R. et S.W. /Royaume-Uni a également reconnu la notion de viol entre époux.
Désormais, la présomption de consentement n’existe que jusqu’à preuve du contraire et le crime de viol est aussi étendu aux couples de concubins ou liés par un pacte civil de solidarité.
Quant au viol commis sur les enfants, il est réprimé par le même article au sein du 4° qui prévoit une circonstance aggravante quand il est commis au sein de la famille : « le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle (…) lorsqu’il est commis par un ascendant ou par toute personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ».
• Les agressions sexuelles
A la différence du viol, l’agression sexuelle n’exige pas d’acte de pénétration mais est constituée par des attouchements de nature sexuelle.
L’article 222-22 du Code pénal qui prévoit l’infraction d’agression sexuelle, précise dans son second alinéa que les agressions sexuelles ont vocation à être constituées « quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et sa victime, y compris s’ils sont unis par les liens du mariage ».
Tout comme pour le viol, « la présomption de consentement des époux à l’acte sexuel ne vaut que jusqu’à preuve du contraire » (article 222-22 alinéa 2 du Code pénal) et tout comme le viol, l’article 222-28 du Code pénal prévoit une peine plus lourde lorsque l’agression sexuelle a été « commise par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ».
– Des atteintes aux prérogatives des membres de la famille
Les relations conflictuelles entre conjoints incitent parfois ces derniers à bafouer les droits de l’autre ou à ne pas respecter leurs devoirs.
Ces actes et ces comportements peuvent alors être constitutifs d’infractions lorsqu’ils sont commis alors qu’une décision du Juge aux Affaires Familiales a été prise.
• La non-représentation d’enfant
L’article 227-5 du Code pénal dispose que « le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000€ d’amende ».
Pour être constitué, le délit de non-représentation d’enfant doit présenter trois éléments :
1) L’obligation de représenter l’enfant doit découler d’une décision judiciaire exécutoire
2) Le parent doit avoir refusé intentionnellement de représenter l’enfant à l’autre personne
3) Le parent qui a refusé de représenter l’enfant ne doit pas avoir de justification
Cette hypothèse est notamment celle découlant d’un droit de visite et d’hébergement à l’issue duquel le parent ne veut pas remettre l’enfant.
En plus du dépôt de plainte, il convient dès lors de saisir le Juge aux Affaires Familiales par le biais d’un référé.
• Abandon de famille
Le délit d’abandon de famille est constitué dès lors qu’une personne n’exécute pas pendant plus de deux mois son obligation de verser une pension, une contribution, des subsides ou des prestations de toute nature qui sont dues en raison de l’une des obligations familiales prévues par le Code civil et issues d’une décision judiciaireou d’une convention judiciairement homologuée.
L’article 227-3 du Code pénal réprime le délit d’abandon de famille par une peine de deux ans d’emprisonnement et de 15 000€ d’amende.
Le débiteur d’une pension alimentaire ne versant pas cette dernière pourra donc se voir condamner par un Tribunal correctionnel.
• Soustraction d’enfant
Le délit de soustraction d’enfant est constitué par le fait, pour un parent, de soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle.
Ce délit est réprimé par l’article 227-7 du Code pénal d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000€ d’amende.
Source : http://www.village-justice.com
Publié le 27 janvier 2014
Lien : http://www.village-justice.com/articles/droit-penal-famille,16058.html